13 Octobre 2014
Editions JC Lattès
Sorti le 20 aout 2014
Sélection Prix Médicis 2014 Roman étranger
Prix Roman Fnac 2014
Présentation
Dans un village enneigé de Tchétchénie, Havaa, une fillette de huit ans, regarde, cachée dans les bois, les soldats russes emmener en pleine nuit son père, accusé d’aider les rebelles. De l’autre côte de la rue, Akhmed, son voisin et ami de sa famille, observe lui aussi la scène, craignant le pire pour l’enfant quand les soldats mettent le feu à la maison. Mais quand il trouve Havaa tapie dans la forêt avec une étrange valise bleue, il prend une décision qui va bouleverser leur vie. Il va chercher refuge dans un hôpital abandonné où il ne reste qu’une femme pour soigner les blessés, Sonja Rabina.
Pour Sonja, chirurgienne russe talentueuse et implacable, l’arrivée d’Akhmed et de Havaa est une mauvaise surprise. Exténuée, débordée de travail, elle n’a aucune envie de s’ajouter ce risque et cette charge. Car elle a une bonne raison de se montrer prudente : accueillir ces réfugiés pourrait compromettre le retour de sa sœur disparue. Pourtant, au cours de cinq jours extraordinaires, le monde de Sonja va basculer et révéler l’entrelacs de connexions qui lie le passé de ces trois compagnons improbables et décidera de leur destin. À la fois récit d’un sacrifice et exploration du pouvoir de l’amour en temps de guerre, Une constellation de phénomènes vitaux est surtout une œuvre portée par le souffle profond de la compassion, vers ce qui doit être et ce qui demeure.
On ferme les yeux et ils sont là, ceux qu’on aime, juste là où on les a laissés, dans leur propre salle d’attente, à nous espérer aussi.
Avis
Une constellation de phénomènes vitaux, premier roman d’Anthony Marra salué par la critique dès sa sortie en 2013 est traduit en français pour cette rentrée littéraire 2014.
Ce texte nous emmène dans ce pays à l’histoire cruelle et sanglante, la Tchétchénie, dans lequel deux guerres ont tout détruit : les infrastructures et le peuple. Nous suivons plusieurs personnages, plusieurs destins qui s’entremêlent pour nous parler d’espoir.
Sur cinq jours ces personnages nous content l’histoire de la Tchétchénie entre 1994 et 2014.
Havaa, une enfant dont le père vient d’être emmené par les russes et la maison brûlée, Akhmed l’ami et voisin de son père qui sauvera Havaa et Sonja, médecin dans l’Hôpital n°6 délabré, à moitié détruit et vide. Khassam, ancien militaire qui toute sa vie tenta de publier un livre de plus de trois milles pages sur les origines de la civilisation tchétchène, et son fils Ramzan qui choisira la voie de la dénonciation, seul moyen de survivre pour lui dans un pays en guerre.
Pendant les deux premiers jours nous en apprenons un peu sur Akhmed, sa femme Ula qui, malade, ne quitte plus son lit, sur sa vie et son ami Dokka, sa petite fille Havaa qu’il mettra à l’abri des russes encore à sa recherche et de Ramzan. Et on rencontre Sonja, elle a quitté Londres, son travail et son petit ami pour revenir dans ce pays détruit après une première guerre afin de retrouver sa sœur Natasha, qui quitta elle-même le pays pour en revenir détruite par la drogue et par ce qu’elle a pu vivre d’ignoble.
Ces deux personnages rapportent à eux seuls la violence et le déchirement de ce pays en guerre mais aussi le chagrin et l’espoir qu’elle suscite. Le sacrifice de Sonja pour retrouver l’amour de sa sœur, le sacrifice d’Akhmed pour témoigner de sa profonde amitié au disparu Dokka.
Puis viennent les autres jours faits de révélations, de vérités cachées, qui éclairent l’histoire personnelle de chaque personnage, leur souffrance. Ramzan et sa trahison, Akhmed et son passé, Havaa et ses secrets, Sonja et ses remords. Et toutes ces vies détruites pas la cruauté de la guerre.
C’est un récit où la violence est omniprésente, une violence physique comme solution à une douleur intérieure plus terrible qui pousse à briser les autres, une torture utilisée comme un jeu, des prisonniers attendant la mort dans une fosse et un village débarrassé de toute vie. Des mots qui terrifient. Des destins qui se croisent au fur et à mesure des chapitres et c’est l’Histoire d’un pays, la Tchétchénie, qui à travers ce roman ressemble davantage à une succession de destructions que de moments de joie, où le seul espoir finalement réside dans l’autre, un voisin, un ami, un inconnu ou une enfant.
Un roman bouleversant dont la lecture m’a pris beaucoup de temps, j’ai voulu intercaler un autre roman pour ne pas laisser tomber. J’ai été touché par la vie de ses personnages, leur histoire, par le style de l’auteur allant crescendo dans ses révélations, dans la douleur et la peur, dans l’amour et la foi.
Il est évident que je vous conseille la lecture de ce roman mais il est évident aussi que sa lecture sera, pour les plus sensibles, difficile.
Le lendemain matin, après que les Russes eurent brulé dans la nuit sa maison et emmené son père, Havaa rêva d’anémones de mer. Pendant que la fillette s’habillait, Akhmed, qui n’avait pas dormi du tout, marchait de long en large devant le seuil de la chambre à coucher, en regardant le ciel qui pâlissait derrière sa fenêtre.