Les corps inutiles - Delphine Bertholon

Présentation
Clémence vient d’avoir quinze ans, de terminer le collège. Un nouveau cycle s’ouvre à elle, lorsqu’elle est agressée, en plein jour et en pleine rue, par un inconnu armé d’un couteau. Ce traumatisme inaugural - même si elle n’en a pas encore conscience - va contaminer toute son existence. En effet, l’adolescente réalise qu’elle perd progressivement le sens du toucher... À trente ans, Clémence, toujours insensible, est une célibataire endurcie, solitaire et sauvage.
Après avoir été maquilleuse de cinéma, la jeune femme se retrouve employée de la « Clinique », une usine d’un genre particulier. En effet, la Clinique fabrique des poupées… mais des poupées grandeur nature, hyper-réalistes, destinées au plaisir – ou au salut – d’hommes esseulés. Le roman déroule en alternance l’histoire de Clémence adolescente, hantée par cette agression dont elle n’a jamais osé parler à sa famille, et le récit de Clémence adulte, assumant tant bien que mal les conséquences, physiques et psychologiques, de son passé. Mais la vie, comme toujours, est pleine de surprises.

Avis
Clémence, quinze ans, s'apprête à rejoindre ses amis pour fêter chez l'une d'elle la fin du collège mais sur le chemin survînt un inconnu. Clémence vient d'être agressé sexuellement, ce n'est pas un viol à proprement parlé mais cela reste tout de même une agression sexuelle plus que traumatisante pour cette toute jeune fille, un traumatisme qui va changer le cours de sa vie. Elle préfère garder le silence, n'en dit rien à ses parents car dans sa famille tout prend des proportions énormes ce qu'elle ne souhaite pas, de plus ce cocon familial l'étouffe alors en parler reviendrait à resserrer davantage encore l'étau familial. Ce silence qu'elle s'impose va l'emmener très loin dans ses délires, tout d'abord elle prend des cours d'autodéfense avant de chercher délibérément à ce que quelqu'un l'agresse afin de pouvoir tuer, la mort d'un de ses êtres abjectes est vu par elle comme une échappatoire à sa souffrance intérieure car son corps lui ne répond plus à aucun signaux, elle ne ressent désormais plus rien, ni chaud ni froid.

Quelques années plus tard, on retrouve Clémence, la trentaine, elle travaille en tant que maquilleuse dans une entreprise particulière et le 29 de chaque mois elle se rend dans un bar afin d'appâter un homme et de se donner, cet acte révèle les dégâts que l'agression a causé sur cette femme fragile et la place qu'a pris le sexe dans sa vie. Elle reste enfermer dans son silence à en vouloir à la Terre entière jusqu'au jour où un homme sans le savoir lui rend ce qu'elle avait perdu.

Le roman tourne autour de la reconstruction de cette jeune fille devenue une femme qui n'est pas ressorti indemne d'une agression terrible. Ce thème est lourd et la place réservée aux sentiments est énorme. A la lecture de ce roman c'est d'abord la colère qui survient puis la rage, la honte n'a plus sa place puisqu'elle est vite remplacée par la culpabilité, l'autodestruction prend le dessus sur l'envie de vivre. Pas le bon endroit ni le bon moment et toute une vie bascule, la souffrance de Clémence celle qu'elle a subit et celle qu'elle s'inflige est terrible.

J'ai été conquise par la façon qu'à l'auteure de traiter ce sujet et attristée de la lente reconstruction de son personnage. Un roman fort.

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article