20 Mars 2018
Présentation
« On écrit pour comprendre ce que l’on ne comprend pas. Quand j’écrivais Vie de ma voisine, mon héroïne me parlait de sa mère. Elle me racontait ses mots, elle évoquait ses gestes. L’amour d’une mère. Je mesurais mon ignorance dans ce domaine. Ma mère n'en savait ni les mots ni les gestes.
Je suis donc partie sur les traces d'une petite fille grecque et arménienne et de sa mère, danseuse orientale et apatride, à Paris dans les années 20.
Ma mère ne voulait rien savoir de son passé. Il a fallu que j’enquête et que je l’invente. Que je trouve les mots pour la retrouver. C’est ce livre, Le chagrin d’aimer.
Je suis passée par la cour du roi de Grèce et par les collines de Fiesole. Par un atelier d’écriture, une maison de retraite, plusieurs voitures, un supermarché, des quantités de paquets de gauloises, une machine à écrire. Autant de circonstances, par-delà les guerres, les destructions, les irrémédiables pertes, où ma mère se battait avec ce qui fait la vie ordinaire : la nourriture, l’argent, le travail, l’amour.
J’ai tenté d’en savoir un peu plus sur elle, sur moi. Chemin faisant, j’ai compris que ce n’était qu’un début. »
Avis
Comment ne pas succomber aux mots de la quatrième de couverture? et ce titre qui mélange la peine à l'amour, pour moi cela n’annonçait pas de scènes heureuses, de moments partagés où plus rien ne compte. Le chagrin d'aimer parle d'une mère, de l'amour filial et du manque; Geneviève Brisac aborde sa mère à travers l'amour qu'elle lui porte et qui, lui semble t-il, n'est pas réciproque tant sa mère est égoïste et excentrique au point d'en avoir parfois honte. Et pourtant c'est une femme originale que j'y ai vu, une femme hors de son temps qui a elle aussi souffert mais n'en souffle mot.
Une mère et sa fille entre lesquelles une certaine distance subsistent malgré le temps et les moments vécus, comme si se tenir éloignée préservait du chagrin ou bien est-ce seulement une maladresse, ne sachant comment aimer. L'auteur livre un court récit autobiographique sans lourdeur de sentiments, mais plutôt intimiste tentant d'expliquer l'absence malgré l'incompréhension croissante. Il n'est pas facile pour une enfant, puis une jeune fille de ne pouvoir compter sur sa mère, Geneviève Brisac n'a pourtant aucun ressentiment mais tente de percer le mystère d'une mère dont le manque d'amour serait à trouver parmi les décombres d'une grande tragédie de l'Histoire.
Femme de caractère à n'en pas douter, la mère de l'auteure m'a comblé, les mots sont juste et sans apitoiement, ici c'est de sa mère que l'on parle et... avec amour.