Qu'est-ce que le crime environnemental ? - Gregory Salle

Présentation
Un quart du commerce mondial de bois serait illégal, le saviez-vous ? Sous l’influence des organisations internationales, l’existence d’une « délinquance écologique », d’une « criminalité environnementale » est désormais visible. Elle prend la forme du trafic d’espèces sauvages protégées, du déversement illicite de déchets toxiques ou de la contrebande de ressources naturelles. Mafias et autres réseaux clandestins opérant dans le Sud global en seraient les principaux acteurs et bénéficiaires.

Et si ces représentations étaient tronquées, voire trompeuses ? Dépassant la conception commune, dont il retrace la genèse et la diffusion, ce livre invite à penser le crime environnemental au-delà de ses manifestations les plus spectaculaires. Contre le juridisme, il soutient que la focalisation sur les infractions patentées sert commodément d’alibi au saccage légal de notre Terre. Aberration ou distorsion, la criminalité environnementale ? Plutôt une expression, arbitrairement stigmatisée, d’un système socio-économique fondé sur l’exploitation.

[…] ce rapport est typique de l’ »absorption économique » qui, en monétarisant la nature, tend à faire d'elle une marchandise. On peut au contraire défendre l’idée qu’en réalité la nature a une valeur intrinsèque ou, mieux encore, que sa richesse est, en tous les sens du terme, inestimable.

Avis
Chercheur au CNRS, Gregory Salle propose de décrypter la crise écologique par le biais des crimes environnementaux, terme très peu juridique à son grand regret. Car il est clair que les méfaits envers la nature sont rarement qualifiés de crimes, plutôt de délits envers l'environnement, de catastrophe environnementale et surtout d'illégalité que ce soit par le rejet de substances polluantes, de commerce .... Le crime contre l'environnement, définition officielle, ne trouve pas son origine essentiellement dans la délinquance ou le crime organisé, on entend beaucoup parlé de trafics (animaux sauvages, défenses d'éléphants ou corne de rhinocéros) ou de déversement illégal de déchets principalement dans le sud du globe.

Même les inégalités, qui pourraient être invoquées comme l'une des causes profondes du développement d'activités illégales aux dépens de l'environnement, sont en tant que telles quasiment absentes des rapports. Tout juste y est-il question de «pauvreté" ,ce qui est très différent: on y perd le caractère relationnel de la notion d'inégalité, a fortiori toute inscription dans les rapports sociaux façonnés par le développement capitaliste. Du reste, c'est le capitalisme lui-même qui, dans ces rapports, est à la fois absent et omniprésent. Absent au sens où le mot n’apparaît pas, mais omniprésent parce qu'il constitue implicitement indépassable cadre général.

Gregory Salle démontre que de nombreuses activités ne répondant pas à la formulation juridique visant clairement l'illégalité passe dans les mailles du filet. En d'autres termes les actions polluantes ou allant à l'encontre de la sauvegarde de la nature des multinationales et autres activités capitalistes ou à fort potentiel rémunérateur ne sont que très rarement pointées du doigt et encore moins pénalisées. Prenons ainsi l'exemple de la déforestation qui rend plus vulnérable aux conditions climatiques (ouragans, cyclones...), l'extraction de matériaux modifiant des régions entières, la construction de barrage empêchant le processus de développement d'écosystèmes, la corruption et la loi du plu riche comme dans l'affaire Chevron/Texaco, j'en passe et des meilleures.

Cet ouvrage ouvre les yeux sur des points de détails qui finalement modifient complètement le sens du pouvoir, c'est révoltant mais tellement subtil. L'avantage de ce livre est qu'il traite du sujet en profondeur, l'inconvénient est qu'en tant que novice la lecture fut pour le moins ardue.

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